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16/10/2012

Les Pigeons - Retour aérien de Benoît Pinaud

Les Pigeons

De leur peu glorieuse image lassés,
Les pigeons, un jour, en ayant assez,
Fort unanimement se révoltèrent.
On voulait, selon quelques congénères,
Les plus fiers parmi tous, qu’à leur endroit
Cessât ce mal, fort répandu ma foi,
D’être « stigmatisés », comme ils disaient.
« N’endurons plus qu’en ville nos méfaits
Nous vaillent injures et triste renom.
L’Histoire se souvient de notre nom,
Notre vaillance servit la Nation.
Désormais, c’est dit, pour toute ration,
De miettes nous ne nous contenterons ».
Voici nos volatiles, ailerons
Gonflés, occupant l’espace public.
Et de leurs roucoulements énergiques
La ville fut bientôt la résonnance.
Telle présence (par là, telle nuisance)
Attira d’honnêtes gens, débonnaires
Mais quelque peu fâchés, qui décidèrent
De dénouer la crise : il fallait bien
Accorder à ce groupe souverain
Une digne nourriture, une riche
Mixture faite des tout meilleurs grains.
Les indignés, sur ce repas peu chiche
Se ruèrent, si bien que leur refrain
Cessa : le poison leur cloua le bec.
Les survivants eurent tôt fait, avec
Ce malheur, de comprendre que le mot
« Pigeonner » ne s’éteindrait de sitôt.

Cette fable rappelle, s’il le fallait,
Qu’il faut toujours, du bon ou du mauvais,
Savoir trier. Mais elle illustre encore
Que l’appât du grain est bien le plus fort.

Copyright Benoît Pinaud

07/03/2012

Les affabulations rebelles

L’âne, la tortue et le chien


L’engeance humaine aux caprices est sujette.
Toujours, obstinément, elle souhaite
Qu’à sa volonté l’on soit favorable,
Ce que nous allons voir dans cette fable.

Certains bourgeois, comme loisir ayant,
La compagnie des bêtes, passe-temps
Louable mais de grand labeur, s’offraient
Parfois l’oisiveté de profiter
Agréablement de leurs protégés.
Leur domaine fort vaste consistait
En maintes pâtures, vergers, jardins,
Terres propices à l’observation
Animale, aux promenades sans fin.
Surprenante est l’humaine décision :
On projeta un jour d’aller chercher
Le baudet. Pour, disait-on, le mêler
A une tendre ballade champêtre.
Mais l’animal, paraît-il, n’est pas l’être
Le plus accommodant ; il décida
De ne point déroger à ce cliché;
Et pas le moindre sabot ne bougea.
« Soit, dit à sa femme le fermier,
Trouvons amitié chez d’autres compères ».
L’indolente tortue fut approchée.
Cette dame pouvait bien se complaire
A être sous tous les angles étudiée.
On jugea fort bien de la carapace :
La doyenne ne daigna se mouvoir.
Pis, restant cloîtrée dans son dortoir,
Elle n’offrit point, animal tenace,
Son cou ridé aux regards patients.

Offensés d’un tel accueil, nos deux braves
S’en retournèrent, chassant leur courroux
En songeant à l’ami fidèle et doux
Qui les attendait et qui, sans entrave,
Les accompagnerait docilement
Pour une paisible marche en sous-bois.
Le ciel fit que le temps se gâta.
Et Médor leur dit, par quelques abois,
Qu’à cette sortie il n’inclinait pas.
D’humeur maussade ou non, il faut admettre
Qu’il fait parfois un temps à ne pas mettre,
Même fidèle, un canidé dehors.

 

Copyright Benoît Pinaud

14/12/2011

Benoît Pinaud - Le fabuleux fabuliste

La Congrégation des crapules et des fantasques accueille en son sein Benoît Pinaud, auteur discret qui remet au goût du jour un genre littéraire oublié : la Fable. Et à l'heure où l'on publie des SMS, il est grand temps de redécouvrir les choses simples.

Il accepte pour la première fois de rendre public un des textes, où les ballons dessinent des arabesques.

Merci à toi, ô Benoît Pinaud !

Le ballon et l’enfant


Sitôt le pied posé
Sur le sable doré,
L’enfant blond divagua.
En ce matin tout neuf, dans un si bel endroit,
L’air fusait tendrement et offrit au bambin
De soulever un brin
Son ballon éclatant.
De ce hasard content,
Il confia sa course
A sa baudruche rouge et au doux vent marin,
Disant adieu à tous
D’un rire cristallin.
Il allait, batifolant et dodelinant,
Sautillant, zigzagant,
Dessinant au sol les courbes les plus plaisantes.
Et rien, à cette heure, pour troubler la séance.
Quand, soudain, au hasard
D’une brise plus faible,
Vinrent à son oreille
Les cris de désespoir
Des parents alarmés
D’une telle conduite, menant au danger.
Le sujet fut hélé
Et sommé de rejoindre,
Ordre vociféré,
La prudente engeance toujours prompte à se plaindre.
L’enfant fut de retour
En gardant le sourire :
Le guidant à rebours,
Son ballon, d’un soupir,
Vint danser follement
Au-dessus des parents.

Tout laisser aller n’est pas un vilain défaut.
C’est une liberté
A ne pas oublier
Que d’aller où nous mène la vie, sans repos.

© Benoît Pinaud