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24/10/2015

Mission Démission. Le Démissionneur à gages, Antoine Lefranc

Inaugurer une collection est toujours un petit défi et c'est à Antoine Lefranc que les éditions Lilo se sont adressées, pour ouvrir leur catalogue de nouvelles, uniques et grand format intitulées "Momentanés". 

Une seule nouvelle, 70 pages et un format d'habitude davantage réservé aux revues de sciences humaines qu'à Pouchkine, Ludmila Oulitchkaia, Mérimée ou Laurent Nicolas. 

Antoine s'en acquitte avec talent, dans ce récit court, qui se déroule dans le monde impitoyable de l'entreprise. Le héros, si je puis dire, s'acquitte avec virtuosité de ses missions spéciales, dont nous ne dévoilerons pas l'objet, jusqu'au jour où la promesse d'un visage remet en cause sa vocation. Son histoire piquante fait parfois songer à l'acidité d'Amélie Nothomb dans Stupeur et Tremblements.Son écriture simple et blanche va droit au but et la qualité majeure du texte d'Antoine réside dans la limpidité de sa progression narrative. 

Son originalité donne envie d'une adaptation cinématographique. Alors avis aux amateurs !

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21/10/2015

Come to me

Il est appuyé contre le lampadaire, elle traverse la route, il se raccroche au lampadaire, elle est là, elle est dans sa bouche, il est entre ses lèvres, il fait nuit, contre le mur, contre elle, au creux de son souffle, dans l'air qu'elle inspire, au fond de sa gorge, au fond de ses yeux, au creux de sa nuque, sa chevelure contre ses joues, ses tempes où bat son coeur, entre ses dents, prête à mordre, prêt à la dévorer.

 

Je suis un filet de salive sur le I du verbe aimer. Fragile.

 

Tu réclames des baisers à perte de vue. Je t'embrasserai à perdre haleine. Je veux fondre et danser dans tes pupilles. Nos lèvres chaudes contre les parois du magasin. À l'aube de notre baiser. Ta langue est une prairie, mon souffle est un abîme. Songe à l'infini du ciel bleu. Je me dissiperai comme un parfum au creux de ta commissure. Perds-toi en toi mon âme. Nos lèvres ne font qu'une. Je veux t'embrasser contre une grille, que tes sandales glissent dans la bouche.Je pleure tes froissements de cils contre ma tempe. Baise-moi encore, enfonce ta langue dans ma bouche mon amour. 

 

Je veux entendre ton coeur papillonner sur ma langue. Tu veux éprouver  mon désir qui frétille sur tes lèvres. Nous sommes  l'origine du monde et sa fin. Regardons le soleil se coucher sur tes papilles. Les lèvres, je les aime dessinées, ourlées.  Tu les aimes fiévreuses, dépassées. Qu'elles rougissent à vue d'oeil, et n'aient plus honte de rien. Qu'elles ne cessent jamais, tu l'entends,  de me parler d'amour. Embrasse-moi encore, et que je ne perde pas une goutte de notre rêve. 

 

Le sucre dégouline sur nos lèvres. À l'aube de notre baiser. Le sel perle sur tes paupières. Ne me retire pas ta bouche.

 

 

11:41 Publié dans Inclassable | Commentaires (0) | Tags : baiser, amour, french kiss | | Digg! Digg |  Facebook |

25/09/2015

Radio Pardie- Les Éditeurs


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19/07/2015

Action Vérité

 

Amandine n'avait pu réprimer une grimace de dégoût. Elliot avait un bec de lièvre qui entravait son élocution. Une partie de son visage était tâché comme s'il avait été brûlé vif. Cette rencontre l'avait d'autant plus surprise que sa silhouette bondissante ne laissait pas présager une telle monstruosité. Au fil des jours elle avait appris à l'aimer, sa drôlerie, sa façon de danser époustouflante. Ses cheveux longs cachaient des yeux gris. Elle les avait oubliés et ce fut après la disparition qu'elle s'en rappela. Elliot se volatilisa comme une ombre quand le soleil apparaît. Elle ne lui avait auparavant jamais posé de questions. Elle  préférait lui tenir la main. Il disparut un jour de neige, sans emporter de bagage. Au beau milieu des sapins et des guirlandes en aluminium.

Chaque matin, au réveil, elle imaginait son retour. C'était devenu un rituel matinal au même titre que le café ou l'eau froide sur le visage. Elle se le représentait avec une barbe de plusieurs jours, il la prenait dans ses bras, ne lui donnait aucune explication et finissait sa vie avec elle, sur un tapis en duvet, au pied d'une cheminée, avec des enfants qui courent derrière les canapés. Mais chaque jour la maison était vide, la journée s'écoulait sans lui. Il avait bel et bien disparu, sans l'embrasser. La gendarmerie n'attacha aucune importance à ce qui ressemblait à une fugue ou à un départ volontaire.


Aucune dispute n'avait précédé son départ.
Aucune mésentente.
Aucun conflit.

Amandine était certaine que l'affection d'Elliot  le dévorerait  comme au premier jour et qu'il n'oublierait jamais les yeux ronds, les boucles, le visage d'angelot de sa compagne et le poids des ans sur leur amour.

Trois mois s'écoulèrent. La pelouse verdissait.

Il revint et lui offrit une marguerite. Elle le reçut comme dans ses songeries matinales sans lui poser de questions. Il ne lui donna aucune explication, jusqu'au jour où, un croissant à la main, il lui raconta tout. Elle avait toujours cru qu'il était fils unique. Or son frère vivait en Suisse, dans un chalet, atteint également d'une malformation génétique et avait décidé de passer sa vie à l'abri des regards. Il l'avait découvert blême, allongé sur son lit, sans médicament. En le voyant, Elliot s’était lancé : "J'ai voyagé pour te dire que l'amour existe, que je l'ai rencontré, il y a dix ans, et que tu peux sortir de ta cachette." Son frère était blanc comme un linge, mais Elliot sentit qu'à ces mots ses yeux pétillaient.

Amandine vola dans les bras d'Elliot et la tasse de café se renversa sur les cuisses du malheureux.

 

17/06/2015

La Quarantaine rugissante - Radio Pardie


08/06/2015

Pour obtenir le Prix Femina

Afin d'obtenir le Femina ou le Prix de Flore, votre serviteur vous a concocté un superbe pitch de roman, libre de droits. Faites-vous plaisir.

Pitch de roman, façon grande littérature française 

 

Paul parle à la première personne, il a vécu un chagrin d'amour terrible, dont il se rappelle les fulgurances sexuelles, racontées en gros plan et avec des mots crus. Extrêmement affecté par cette séparation, il s'intéresse au mouvement anti-mariage pour tous, collectionne les casques de la Wehrmacht, et s'inscrit à l'association "Les nouveaux Pétainistes" pour lutter contre la création dans les régions françaises de micro-califats. Il garde de son expérience de trader la haine d'un monde superficiel gouverné par le marketing, la publicité et le pognon, mais se rappelle avec fascination de ce moment où il prenait de la coke et où les filles étaient faciles. Sa dépression s'accentue lorsque sa sœur, qu'il déteste, séquestrée 10 ans dans une cave en Autriche est libérée et vient vivre chez lui. Sa misanthropie s'accroît. Il décide de ressortir de son tiroir, toutes les lettres de rupture odieuses qu'il a envoyées à ses ex, quand il était Trader et qu'il prenait plaisir à les humilier. Il devient scientologue et sa sœur tombe d'un avion, mais survit car elle a les cartilages mous. Sa femme Lucienne a pour passe-temps de recopier à la main des articles de Wikipedia, un jour elle tombe sur la biographie d'une critique d'Art un peu vulgaire qu'elle a déjà croisée en club échangiste avec Paul, c'est un déclic : elle abandonne Paul et se lance dans des installations d'Arte Povera avec des spaghettis.Paul cherche à réussir son suicide. Il erre dans le Quartier latin et se souvient du jazz dans les caves et de son premier amour. Le Quartier latin devient un personnage à part entière du livre. L'aimant autour duquel tout gravite. Le lecteur croise Sartre, Beauvoir et Marc Édouard Nabe jeune au détour de la Rue Bonaparte. Un soir de Beuverie Paul déprimé et passablement éméché lance à un habitué des Trois Maillets : "Je vais te faire courir moi sale PD!" S'ensuit une altercation violente : Paul sort son couteau à cran d'arrêt et tue le garçon de 25 ans à peine. Le lendemain il s'enfuit en Colombie, où il deviendra, sous l'identité d'Arturo éleveur d'autruches. À Versailles, Lucienne installe ses toiles dans la galerie des glaces.

08/04/2015

Radio Pardie - Bon anniversaire !


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14/03/2015

Radio Pardie - Je t'aime Frédéric Miterrand !


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06/02/2015

Sagan des villes et Sagan des champs

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Les grandes villes n'existent pas est une méditation sur la vie à la campagne, de l'enfance à l'âge adulte. Sur le bonheur, quand la vie palpite autour du stade municipal, de l'élection de la Rosière sur un char à foin, ou encore de l'ail sauvage que les enfants ramassent, dans les marais fiévreux. Cécile parle pour tous ses copains de classe, ses ex, ses voisins, tous ceux qui savent ce que c'est que de vivre à 30 kilomètres du premier centre commercial. Cécile n'écrit pas Guerre et Paix. Une description libre. Quelquefois bouleversante. Elle passe du coq à l'âne, de l'école à l'Église, du loto aux premiers scooters. Indépendamment de ces instantanés, une voix émerge, mélancolique et vive. "Mais l'église, c'est surtout le lieu, où même si on ne croit pas en Dieu, même si on n'y comprend rien, si on n'y ressent rien, on préfère tout de même s'y montrer sous son meilleur profil."Et une image m'a traversé l'esprit en la lisant, celle de Françoise, avec ses fulgurations et ses aléas. Cécile aura sans doute des ratés : elle racontera peut-être mal la vie d'une copine qui vend des aspirateurs, mais, un jour, tu verras, elle nous renversera sur sa mob.

Les grandes villes n'existent pas. Cécile Coulon - Seuil

23/01/2015

Le retour du Prix d'Amérique - Leçon n°6 Haras bisants.

Le Qatari est plein de pognon, il ne sait qu'en faire. du coup dixit Courrier international le "Qatar est le Club Med des terroristes". Heureusement le Cheik sait aussi l'investir dans des activités plus terre à terre des  Légendes,  qui volète. Et s'il veut acheter des équidés, qui suis-je pour l'en décourager ?

Longtemps le Qatari pataugeait et, pardonnez-moi l'expression, passait son temps à se faire "arnaquer" voire "Qatarnaquer" en achetant des crèmes Shisheido, des sacs Herpès et des joueurs du PSG. Mais il semble, depuis le Prix de l'Arc de Triomphe 2014 s'être aguerri. Ce jour-là, en grandes pompes, l'Emir a fait le déplacement pour voir triompher son poulain. Et comme un Émir n'arrive jamais seul, il est venu avec sa cour et son troupeau de princesses pour triompher, et comme ce qui est dit doit être fait, et c'est plus facile avec des monceaux royaux de pognon, son pur-sang a gagné. 

Greffe-toi avec tes moyens modestes sur sa Djellaba Courrèges, telle une mite qui va manger un peu de ses fils de soie d'or fin. Rendez-vous dimanche 25 janvier 2015  même si je préfère l'affiche de 2008.

Toi, petit scarabée, ne sous-estime pas le Qatari, petit par la taille mais grand par le pognon. 

 

 

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18/01/2015

Dix résolutions (intenables) pour 2015

 

Mettre à la retraite tous les journalistes de plus de 60 ans que l'âge a rendus peureux.

Pouvoir rire de tout et avec tout le monde (la liste des exceptions suivra sous pli discret).

Aimer Place du Panthéon.

Aimer in the shower tonight.

Ne pas rouler en trottinette sur les pieds d'un fantassin armé jusqu'aux dents du dispositif Vigipirate niveau triangle rouge foncé tout ça, tout ça.

Ne pas caricaturer Paulette (c'est facile tant que je n'en connais pas).

Boire un café avec Cameron Diaz et de la mousse.

Lire Arsinoé en Italien, en Danois, et, cerise sur le gâteau,  en Finlandais si là-haut t'es bien luné, mais ne le prends pas mal, steup.

Se concentrer sur le sport et non la salle à la salle de sport (et muscler mon intelligence).

Retarder 2017 avec des ruses de Sioux.

Et bonus ! 

Engager une vraie maquilleuse  brune pour l'anniversaire des enfants ( c'est la résolution Gala Closer à 950 euros pour la lectrice qui a du mal à joindre les deux bouts).

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Moi après les attentats

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

23:17 Publié dans Actualité, Inclassable | Commentaires (3) | | Digg! Digg |  Facebook |

02/12/2014

Les grands Entretiens du mardi - Elie Guillou

 Elie Guillou sort un nouvel album cristallin intitulé Chanteur public, reste à l'affiche du conte Rue Oberkampf et continue d'animer son Lavomatic tour qui fait entrer la musique dans les sèche-linge. J'ai toujours rêvé de rencontrer Tintin, mais -Ho! surprise! - ce jour-là, il a une guitare. 

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Crédit - François Legeait  

Sur l'ensemble de tes expériences artistiques, je vois comme une tentative de redéfinition de la notion d'artiste. En la dépouillant du mercantilisme et par une forme de retour aux sources. Je voulais donc savoir quel est la définition de l'artiste ?

Il y a plusieurs choses : je me pose vraiment la question de la fonction de l'artiste. Ce qu'il est, je ne sais pas ; mais à quoi sert-il dans notre société? Est-ce qu'aujourd'hui, dans le mode actuel de diffusion des œuvres, on remplit les fonctions essentielles de l'artiste ? Je ne prétends pas être arrivé à une conclusion. Je fais comme tout le monde, j'ai mes petites obsessions et j'en fais des théorèmes qui n'engagent que moi. Quand même, je pense que l'un des rôles de l'artiste, c'est d'être le garant de la différence. Nous sommes tous porteurs d'une singularité mais le monde est souvent rétif à la singularité car elle demande un effort à l'autre, un effort d'adaptation. À mon avis, l'artiste a pour rôle de plonger en lui-même, de chercher sa différence la plus profonde de la brandir et la soutenir contre tout le monde malgré, semble-t-il, un phénomène de rejet. Plus on supporte une singularité et moins il est facile de la recevoir. "Pourquoi tu fais différemment ? Pourquoi veux-tu changer ? Tais-toi, chut!" Comme l'artiste est garant de la différence, il est garant de l'ouverture. À force de la soutenir, les gens qui sont confrontés à cette altérité, l'apprivoisent et enfin, s'ouvrent.

Du coup tu penses que le réseau et le mode de diffusion de ces artistes ne permet pas de d'exprimer cette différence?

L'industrie de la musique, c'est un lieu commun, est très formatée. Pour passer sur les radios nationales, une chanson doit durer moins de trois minutes trente, le refrain doit arriver dans les trente premières secondes, il faut qu'il soit repris au moins trois fois... Ces exigences, qui sont liées à l'économie, rendent les auditeurs paresseux et l'ouverture plus raide. Faire valoir un art et non une production est une chose difficile à faire entendre dans l'état actuel des choses. Autour de moi, tous  les artistes en souffrent.

Je constate une forme de modestie dans ta démarche notamment dans le Lavomatic Tour et dans ton expérience de globe-trotter, qui va de lieu en lieu pour faire connaître ta musique. Elle contraste avec certains termes que tu utilises. Dans une interview au Parisien tu parles "d'attentat culturel" pour le Lavomatic tour et il y a une chanson très belle qui s'intitule "Le Maquis mélodique ". Cette revendication de différence tu la portes finalement assez fort. Tu sembles moins lisse que ce que certaines expériences artistiques laissent paraître.

Lisse ou non, je m'en fiche. J'essaie d'exprimer qui je suis et de toute évidence, je ne suis pas un rockeur. L'image de l'artiste maudit ne m'intéresse pas du tout et j'essaie, dans la mesure du possible, d'être agréable avec les gens que je croise. Même ceux avec qui je ne suis pas d'accord...  À mes yeux, l'engagement n'est pas de dire « merde » en claquant la porte au nez de ceux qui nous blessent. Je pense que l'idéal c'est de garder la porte ouverte tout en ne lâchant rien sur sa singularité. Je n'y arrive pas toujours, évidemment, c'est une vision un peu idéale des choses mais c'est ce but-là que je poursuis. Pour parler concrètement : sur mon disque j'ai choisi de laisser aux chansons la durée qui me semblait nécessaire pour exprimer ce qu'elle avaient à dire. La majorité des chansons durent cinq minutes ou plus. Pour un passage radio, ça n'existe pas. J'ai aussi choisi d'aller au bout d'une vision poétique de la chanson ce qui rend certains textes un peu moins accessibles. On a choisi, avec Pierrick Hardy, de ne pas mettre de batterie etc. Tous ces choix sont faits pour renforcer l'expression mais ils vous éloignent forcément du marché, tel qu'il existe. En même temps je le savais avant de le faire donc je ne vais pas venir gueuler maintenant, je l'ai choisi.Ça ne m'empêche pas de regretter que toutes les expressions ne soient pas considérées sur un pied d'égalité.

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Dans le nouvel album, l'écriture est ciselée : tu dessines un paysage qui n'appartient qu'à toi. Des chansons d'une limpidité étonnante. Je n'ai pas trouvé de référence dans l'écriture. Je me demandais si tu ne voulais pas t'extraire de notre époque ?

J'aimerais bien que ce soit moderne mais ce qui m'intéresse dans les chansons c'est la part intemporelle des choses. C'est lié au fait que je suis très branché musiques traditionnelles. J'aime l'éternité qui s'en dégage. J'aime la musique traditionnelle quel que soit le pays : iranienne, brésilienne, italienne, bretonne... Je pense que ces moyens d'expression me touchent parce qu'ils sont antérieurs à l'industrie de la musique. C'est dur de ne pas opposer les choses, je ne veux pas pas être manichéen, j'aime aussi des disques très produits d'artistes pop ou électros : pour moi Björk... c'est parfait. Dans les chants traditionnels, il y a une forme de spontanéité, qui n'est pas "raffinée", en prise directe avec la vie des gens, leur corps, leur manière d'être. Dans ces chants-là, je trouve les expériences les plus fortes, les plus gros reliefs, des aspérités très marquées. Pour les textes, ceux qui m'inspirent le plus sont Léonard Cohen, Bob Dylan, cette mouvance...

On ne sent pas les influences, l'ensemble est vraiment singulier.

Quand j'écris, je laisse le sujet décider. Si on pense aux références pendant qu'on écrit, c'est mal barré.

Dans les billets que tu mets en ligne sur tes voyages, au Kurdistan, en Tunisie... Il y a un dialogue qui se noue avec la musique, je souhaitais savoir quelle langue tu parles quand tu es sur place.

J'adore apprendre une langue sur place, mais malgré mon fantasme de l'errance ultime, je fais  des voyages très courts. Un mois, c'est rien. J'adore apprendre un maximum de mots, c'est un gage de bonne volonté envers les gens qui t'accueillent. En général, l'anglais, des bribes de langue du cru et un traducteur font une tambouille acceptable...

Or, lorsque nous te lisons nous avons l'impression d'une compréhension et d'un dialogue immédiats, pouvons-nous l'attribuer à la musique? Cela fait partie d'un projet global?

C'est arrivé par hasard. Quand j'ai lancé ce projet de chanteur public, Gaël Le Ny qui a fait la couverture de l'album « Paris-Brest », m'a dit "Tu sais que chanteur public, c'est quelque chose qui existe chez les Kurdes ? Moi, j'y vais avec un autre ami photographe, tu devrais venir. » Je suis parti, j'ai découvert ces chanteurs et le contexte des Kurdes de Turquie qui sont vraiment opprimés  par le gouvernement. Ce qui m'intéressait c'était la musique, mais tu ne peux pas l'extraire du contexte kurde et de l'histoire des Kurdes. Ça ne pouvait que me toucher ! Un peuple qui est un peu le perdant perpétuel de l'histoire, qui n'a pas d'état mais qui refuse de lâcher sa singularité. Comme l'artiste. Une forme de métaphore de l'artiste. Nous ne refusons pas les autres, mais nous refusons d'être comme les autres. Je trouve ça très noble. Du coup, j'ai fait un transfert vite fait bien fait. Même Freud a été pris de court !

Tu parles de "Chanteur public", dans ce cadre, tu fais parfois des concerts à domicile. À quoi ressemble un concert d'Elie Guillou dans notre chambre ?

Il y a beaucoup d'artistes qui le font ! Comme les salles classiques sont de plus en plus difficiles d'accès, à cause de l'abondance des propositions, il faut bien inventer autre chose. Enfin inventer est est un grand mot... On s'adapte ! Organiser des concerts chez les gens est très facile. Il y a des réseaux de chansons en appartement. Ce qui est intéressant dans cette proximité, c'est que tu ne peux pas arriver avec une posture d'artiste ou de vedette, ce qui compte c'est qui tu es et ce que tu proposes.

La démarche du "Lavomatic Tour"s'inscrit dans ce sillage. Ce qui m'a passionné en la découvrant, c'est la modestie et la liberté qu'elle offre, tu peux aller jouer partout. Mais j'ai vu qu'il y a eu un échec cuisant à Athènes, est-ce que tu peux nous en parler?

Bon, tu vas dire que j'ai toujours la même grille de lecture du monde mais tant pis, c'est ma petite obsession... Voilà l'histoire : j'ai un pote, Rémy, qui a organisé un Lavomatic Tour à San Francisco. Je n'avais jamais pensé à le faire à l'étranger alors j'étais jaloux. Mais content ! Je me suis demandé pourquoi, effectivement, ne pas le faire à l'étranger quand l'occasion se présente. Cet été là, j'allais à Athènes, je disposais de relais d'artistes là-bas, il n'y avait plus qu'à proposer l'idée et le faire. Quand j'arrive sur place et que j'explique le projet, l'incompréhension est totale, proche du rejet. En fait, j'avais fait abstraction du contexte. En Grèce, personne n'utilise les laveries automatiques. Il y a plusieurs raisons mais en gros, c'est encore le rôle de la mère de s'occuper du linge. Même quand on a 45 ans, on va encore porter son linge chez sa mère, j'ai vu des tas d'exemples de ce type. Donc il est hors de question d'aller au Lavomatic. C'est vraiment pour les gens seuls, les pauvres, les immigrés... Pour un Athénien, c'est le repère de la Pègre. C'est presque déshonorant ! À Athènes, y'a deux ou trois laveries, malgré plusieurs millions d'habitants... Se rajoute à ça le marasme économique. Les musiciens galèrent suffisamment pour trouver concerts payés, ils n'ont pas envie de se dévaluer lors de concerts « pour rire ». S'ils jouent là gratuitement, pourquoi les paierait-on la prochaine fois? Bref, on m'a envoyé bouler. Ça a été une bonne leçon : on a une idée qui marche et on croit qu'elle peut marcher sur la terre entière. C'est le virus du magasin franchisé... Moi, j'ai voulu standardiser le partage et on m'a dit merde. Tant mieux. J'aurais au moins appris ça et passé de bonnes vacances à ne rien faire.


Je joue d'la mandoline (Bourvil) - Sylvain. 

Le Lavomatic Tour et la découverte d'un texte étonnant.

Durant l'expérience du Paris-Brest qui est encore différente du Lavomatic, c'est un voyage à pied, tu étais logé chez l'habitant? Était -ce naturel pour toi?

Ça dépendait des fois : habitants, hôtels, mairies qui accueillaient le spectacle.
Oui, c'est comme lorsque tu vas dormir chez un copain, sauf que c'est ton pote depuis une heure.

Revenons aux voyages au Kurdistan? Tes chroniques semblent douces-amères. Notamment celles qui traitent du camp de Domiz. Quelle était ta posture de jeune occidental dans un camp de réfugiés Kurdes syriens ?

C'est rare que quelqu'un aille là-bas sans y être obligé par son travail.... La plupart des voyageurs s'y rendent car ils sont dans l'aide humanitaire. Moi j'y suis allé presque par hasard. Au Kurdistan, on m'a dit "si tu cherches des musiciens syriens, tu en trouveras à Domiz." Je voulais faire un comparatif de la musique kurde dans les quatre pays du Kurdistan et la Syrie, je ne pouvais pas y aller. Une étudiante française m'a confirmé que les musiciens étaient nombreux dans ce camp et avides de rencontrer des visiteurs. Je l'ai ressenti, au début les gens se demandent vraiment ce que tu fais. Et puis le dialogue se noue. Je ne suis pas venu pour les sauver, ni leur renvoyer de la pitié... je voulais les rencontrer dans une situation qui m'est inconnue, sur laquelle je n'ai ni position, ni avis. Je suis resté trois jours, c'est très court, trop court, mais j'ai quand même réussi à organiser une scène ouverte sous une tente. Plein de gens sont venus, des enfants, des vieillards, des instrumentistes, une chorale, c'est devenu un moment de communion incroyable. Le fait d'avoir un regard extérieur leur faisait prendre conscience de la valeur de leurs chants. Entre eux, ils connaissent ça par cœur alors ça ne vaut pas grand chose. C'est comme un parisien qui chante du Piaf à d'autres parisiens, c'est chiant. Mais si vous mettez un Argentin comme public, Piaf redevient singulière. Bref, j'ai écouté leurs chants et j'ai un peu approché la réalité de leur situation. C'est ça que j'ai tenté de partager dans les textes. Le regard de quelqu'un qui est resté 3 jours. Rien de plus. Leur tragédie est hors de portée d'un individu seul, donc tout ce que l'on fait face à ça est dérisoire. Donner 1000 euros, écrire un texte, rester quelques jours pour aider... ça reste infime.  Alors, faute de mieux, on fait avec ce qu'on a... Des petits bouts de pansements.

Dans tes textes tu évoques le ressentiment de Sunnites en Irak ?

Je parle de ce que j'ai vu, c'est tout... C'est dur d'être catégorique. C'est l'axe du voyageur qui m'intéresse, je n'ai pas  un avis documenté, universitaire... Tout ce que je fais, c'est collecter des cas particuliers. Mais oui, semble-t-il, il y a comme un renversement des oppressions. Certains Sunnites travaillent au Kurdistan irakien, où ils sont assez mal considérés d'ailleurs, mais au moins ils sont en paix. À la chute de Saddam Hussein, qui était Sunnite, les Kurdes et les Chiites ne se sont pas empressés de protéger les Sunnites. N'est pas Nelson Mandela qui veut ! Les Kurdes, eux, ont obtenu une autonomie qui leur permet de se protéger des menaces extérieures et certains sunnites se réfugient chez eux...

As-tu l'impression que cette autonomie est une satisfaction pour les Kurdes ?

Oui, c'est une fierté incroyable. C'est difficile d'imaginer ce que ça peut être pour eux, qui se sont fait casser la gueule de tout les côtés pendant un siècle.

My sweet pepper Land qui se passe au Kurdistan turc donne l'image d'un peuple de maquisards pacifiques, cachés dans les montagnes, n'est-ce pas un peu idyllique?

Je dois dire que ça correspond un peu à ce que j'ai senti. Je n'ai pas vu un peuple conquérant mais un peuple qui cherche à assurer son existence. La première fois que j'y suis allé, il y avait des grèves de la faim dans le Kurdistan turc. 800 personnes, une grève d'une ampleur inédite. Les premiers grévistes sont allés jusqu'à 66 jours de grève. À 60 jours, la mort est proche... Il y avait d'immenses manifestations de soutien à Diyarbakir et à l'occasion de ces manifs, j'ai vu le déséquilibre du rapport de forces. Entre un gouvernement qui envoie ses unités anti-émeutes avec des canons à eau, des lacrymos.. et des gens qui se réunissent sans armes. Après, les kurdes ont une force armée, le PKK, que je n'ai pas vue. C'est une guerre larvée. Cependant le discours des responsables politiques kurdes et de la population n'est pas de faire la peau aux Turcs, je n'ai jamais entendu ça. Tout le monde à le même discours, où que tu ailles : "Nous voulons pouvoir parler notre langue, être des citoyens comme tout le monde. Avoir le droit à une représentation politique." On ne parle pas de revanche, malgré la colère et l'amertume.

Dans le dernier album, il y a une chanson qui s'appelle Vaï avec des connotations brésiliennes . Est-ce que tu as envie de voyager aussi en Amérique du Sud ?

J'y suis déjà allé, en vacances ! Rien à voir avec les canons à eau cette fois là... C'était musique et rhum blanc. Pour quelqu'un qui aime la musique, c'est un peu la caverne d'Ali Baba : une foule de musiques variées, très métissées, une musique actuelle très vive, dansante, une invitation à se réunir. La musique Brésilienne, j'en écoute tout le temps... Dans Vaï, deux vers ont été empruntés à une chanson brésilienne : Timoneiro de Paulinho da Viola. Dans mon Panthéon personnel, les artistes du Brésil figurent en bonne place : Renata Rosa, Milton Nascimento, Caetano Veloso, Lenine...

Ta marque de fabrique est la sobriété, or dans une chanson qui se nomme "Claquer ta machine" on sent le côté showman prêt à s'exprimer.

Cette chanson, c'est une blague. Une parodie d'une chanson de Christophe Maé. Le côté showman, je le découvre depuis peu. Pour le moment, je réserve cet aspect de ma personnalité à un spectacle qui se nomme Rue Oberkampf dans lequel je raconte mes débuts de chanteur avec beaucoup plus d'humour, beaucoup plus dans le show, plus expansif, tandis que mes chansons relèvent plus de l'intériorité, plus méditatives, tranquillement. J'ai les deux en moi et je trouve ça difficile de les faire cohabiter dans un même objet, c'est à ça que je travaille. Être entier. Si j'arrive à mélanger l'humour, la tendresse, la poésie, l'absurde, le show, la spiritualité Chinoise et le ping-pong rennais, alors j'aurais exprimé « Elie Guillou » mais j'en suis loin... c'est le ping-pong qui demande le plus de boulot.

Tes chansons contiennent une part de récit, mais exigent une qualité d'écoute plus grande que celle que l'on peut avoir quand on tombe par hasard sur un titre à la radio. Dans l'album précédent il y a une chanson que j'adore, très méditative, qui se nomme, "Il reste des choses à chanter".

Oui, avec la viole de gambe, la clarinette... ce sont des instruments très planants. On a choisi ces timbres là avec Pierrick Hardy, qui a fait la direction artistique du disque et qui a parfaitement compris la nudité et la souplesse du sentiment que je voulais exprimer dans les chansons. Je pense que ça colle avec une part de ce que lui-même tente d'exprimer dans ces compositions personnelles alors la rencontre a été assez évidente... Il a proposé des musiciens (Marie-Suzanne de Loye à la viole, Catherine Delaunay à la clarinette et Zé Luis Nascimento aux percussions) qui possédaient eux aussi ces qualités-là. Pour couronner le tout, l'ingénieur du son François Casays, a compris notre projet en un clic de souris et a traité l'enregistrement dans le même sens. À la fin, ça fait un disque avec une intention très tranchée !

Et pour t'écouter au plus vite ? 

On peut acheter le disque en le commandant sur www.elieguillou.fr. En concert, il n'y a pas de dates pour ce répertoire mais le conte « Rue Oberkampf », sera joué tous les mercredis du 14 Janvier au 25 Mars, au théâtre du temps à Paris.

28/11/2014

Conseils de baroudeur et délicatesse masculine - Radio Pardie


21/10/2014

Les deux livres de l'automne

"Observer les faiblesses humaines, la physiologie du pouvoir, la fragilité des relations, l'inconsistance des liens, la force colossale de l'argent et de la férocité. L'impuissance absolue de tous les enseignements mettant en valeur la beauté et la justice, ceux dont je me suis nourri."

Roberto Saviano - Extra pure - Éditions Gallimard

"Et surtout, comprenez que mon cœur est déjà pris. Il l’est depuis fort longtemps maintenant. Pris par la mer. Pris par le port vieux comme moi qui m’attache. Par le ciel bleu flamboyant dont la Vierge culminante me garde. Pris par les hommes, les femmes, les enfants, qui s’arc-boutent dans mes criques et sur ma basilique."

Caroline Capossela - Les Amuse-gueules - Editions Lilo



15/09/2014

Radio Pardie, les Poupées russes et Scarlett


14:27 Publié dans Radio Pardie | Commentaires (0) | | Digg! Digg |  Facebook |

02/08/2014

MOSSAD, mises en plis et poissons grillés


Rien que pour vos cheveux : Extrait #3 par merzboy

"C’est sympathique la balade à l’intérieur du dedans."

Voir ou revoir Rien que pour vos cheveux, en pleine opération des forces spéciales israéliennes est une pure merveille, film définitivement culte.

La première heure tutoie les sommets, tandis que la deuxième patine, mais c'est trop tard le bien est fait. Cette première période atteint des cimes de bêtise et de drôlerie inatteignables. Zohan soldat israélien surentraîné, "Rembrandt de la grenade", qui en a dans le pantalon et dont la maîtrise des arts martiaux défie la pesanteur veut renoncer à sa vie tournée vers la violence pour devenir coiffeur répandre le bien, "faire les cheveux soyeux comme de la soie", mais son ennemi juré, un palestinien surentraîné dit " le Fantôme" veille, incarné par un John Turturro impérial dont on ne voit que les yeux.

Le goût de Zohan pour le disco, les filles en maillot de bain et le houmous font du film le spot idéal des soirs d'été, même si vous devez impérativement mettre votre cerveau au vestiaire avant, car ça c'était avant.

Il faut le voir pour le croire. Zohan détruit à lui-seul la moitié de Gaza, affronte une mini-intifada, en arrêtant les pierres avec ses huit mains, assène les répliques inoubliables avec une potacherie qui frôle la psychiatrie, tandis que le fantôme aux identités multiples ouvre des fast food à NYC, pleins de serveurs douteux habillés de keffiehs palestiniens. Ne ratez pas ce grand film pacifiste où les apprentis terroristes appellent la hotline du Hezbollah...Cette comédie romantique où Zohan fait "Bim, bam, boum" avec toutes les clientes sexagénaires du salon de coiffure...Ce bio pic où un autodidacte des cheveux refuse même les propositions alléchantes de "Paul Mitchell", le plus beau salon de coiffure de New-York, sorte de Franck Provost en plus pourri, avec des coupes années 1980, mais pas vraiment le haut du panier à ciseaux. La vraie star du film est le pantalon du Zohan, reflet permanent des états d'âme du héros. Si je puis dire.

- Tu es bionique ?
- Non, je ne vais qu’avec des femelles.